L’appel des intellectuels israéliens à la gauche mondiale

Mickey Gitzin, David Grossman, Eva Illouz et Raphael Zagury-Orly figurent parmi les 65 signataires de la lettre ouverte.
(photos de David Grossman et Rapahael Zagury-Orly: © Claude Truong-Ngoc / Wikimedia Commons – photo d’Eva Illouz: © Corinne Kern)

Soixante-cinq intellectuels israéliens, militants de la paix et progressistes, ont publié une lettre ouverte [le document intégral en anglais et la liste des soixante-cinq signataires sont publiés en fin d’article] aux intellectuels progressiste européens et américains pour dénoncer leur absence de condamnation des actes terroristes du samedi 7 octobre en Israël, lorsque “le Hamas a lancé une attaque sans précédent comprenant le meurtre de masse de civils innocents dans leurs foyers, une violence indiscriminée envers les femmes, les personnes âgées et les enfants, et des enlèvements massifs de citoyens israéliens. Des familles entières ont été anéanties dans ce carnage, des communautés entières réduites en cendres, des corps mutilés, des nourrissons massacrés”. En rien soupçonnables d’être anti-palestiniens ou israélo-centrés, ils s’inquiètent de l’incapacité d’une partie grandissante de la gauche à se montrer ferme face à l’assassinat, à la mutilation, au viol et à l’enlèvement de civils.

Le collectif lance un appel à “certains éléments de la gauche mondiale, des individus qui étaient, jusqu’à présent, nos partenaires politiques”: “En ce moment, plus que jamais, nous avons besoin du soutien et de la solidarité de la gauche mondiale, sous la forme d’un appel sans équivoque contre la violence indiscriminée envers les civils des deux côtés”, avant de noter que la réponse israélienne par des bombardements massifs sur Gaza et ce “cycle d’agression mine gravement notre lutte de longue date contre l’oppression et la violence, et en faveur de droits complets et de l’égalité pour tous les résidents d’Israël-Palestine”

“Certains ont refusé de condamner la violence, poursuit le texte, affirmant que les étrangers n’ont pas le droit de juger les actions des opprimés. D’autres ont minimisé la souffrance et le traumatisme, arguant que la société israélienne s’était attiré cette tragédie. D’autres encore se sont protégés du choc moral par des comparaisons historiques et des rationalisations. Et il y a même ceux, nombreux, pour qui le jour le plus sombre de l’histoire de notre société était une cause de célébration.”

Les auteurs, juifs et arabes, universitaires, politiques, entrepreneurs, auteurs, journalistes, militants de la paix, au nombre desquels on compte le directeur du New Israel Fund, Mickey Gitzin, l’écrivain David Grossman, la sociologue Eva Illouz ou encore le philosophe Raphael Zagury-Orly, se disent surpris, on les sent atterrés: “Nous n’avions jamais imaginé que des individus de gauche, défenseurs de l’égalité, de la liberté, de la justice et du bien-être, révéleraient une insensibilité morale extrême et une imprudence politique aussi poussée.”

“Soyons clairs, poursuivent-ils. Il n’y a aucune justification pour tirer sur des civils dans leurs foyers ; aucune rationalisation pour le meurtre d’enfants devant leurs parents ; aucune raison pour la persécution et l’exécution de personnes participant à des fêtes. Légitimer ou excuser ces actions revient à trahir les principes fondamentaux de la politique de gauche.”

Cette lettre rappelle qu’il “n’y a aucune contradiction entre s’opposer fermement à la subjugation et à l’occupation israéliennes des Palestiniens et condamner sans équivoque des actes brutaux de violence contre des civils innocents. En fait, toute personne de gauche cohérente doit adopter ces deux positions simultanément“, et s’achève par un appel à “nos pairs de gauche à revenir à une politique basée sur des principes humanistes et universels, à prendre une position claire contre les abus des droits de l’homme sous toutes ses formes, et à nous aider dans la lutte pour rompre le cycle de la violence et de la destruction.”

Cette lettre s’inscrit dans le contexte particulier, non pas tant de la réaction pour le moins équivoque de LFI en France, que de ce qui s’est passé dans plusieurs universités américaines: des dizaines d’organisations étudiantes des prestigieuses universités de Harvard, Stanford et autres ont signé la semaine passée des déclarations dans lesquelles elles semblaient justifier les atrocités commises par le Hamas en Israël le 7 octobre au nom de la “résistance contre le régime d’occupation”, affirmant qu’Israël est “entièrement responsable de la violence actuelle” et que “le régime d’apartheid est seul responsable”.

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October 16th, 2023
Statement on Behalf of Israel-based Progressives and Peace Activists
Regarding Debates over Recent Events in Our Region:

We, Israel-based academics, thought leaders and progressive activists committed to peace, equality, justice, and human rights, are deeply pained and shocked by the recent events in our region. We are also deeply concerned by the inadequate response from certain American and European progressives regarding the targeting of Israeli civilians by Hamas, a response which reflects a disturbing trend in the global left’s political culture.

On October 7, 2023, Hamas launched an unprecedented attack that included mass murder of innocent civilians in their homes, indiscriminate violence towards women, the elderly, and children, and mass kidnappings of Israeli citizens. Entire families were wiped out in this carnage, whole communities were reduced to ashes, bodies were maimed, infants were massacred. It is impossible to overstate the damage caused by these events, both on a personal and a collective level. The traumatizing events of that Saturday in October will leave a lasting mark on our hearts and memories.

As expected, in response to Hamas’s actions, the State of Israel launched a massive military operation in Gaza. We still cannot estimate the death toll of these attacks, but it is likely to be higher than anything we have witnessed heretofore. This cycle of aggression severely undermines our long-standing struggle against oppression and violence and in pursuit of full rights and equality for all residents of Israel-Palestine. At this moment, more than ever, we need support and solidarity from the global left, in the form of an unequivocal call against indiscriminate violence towards civilians on both sides.

Many of our peers worldwide have expressed strong opposition to Hamas’s attack and have offered unambiguous support for its victims. Prominent voices in the Arab world, too, have made it clear that there is no justification for sadistic murder of innocent people. However, to our dismay, some elements within the global left, individuals who were, until now, our political partners, have reacted with indifference to these horrific events and sometimes even justified Hamas’s actions. Some have refused to condemn the violence, claiming that outsiders have no right to judge the actions of the oppressed. Others have downplayed the suffering and trauma, arguing that Israeli society brought this tragedy upon itself. Yet others have shielded themselves from the moral shock through historical comparisons and rationalization. And there are even those – no small number – for whom the darkest day in our society’s history was a cause for celebration.

This array of responses surprised us. We never imagined that individuals on the left, advocates of equality, freedom, justice, and welfare, would reveal such extreme moral insensitivity and political recklessness. Let us be clear: Hamas is a theocratic and repressive organization that vehemently opposes the attempt to promote peace and equality in the Middle East. Its core commitments are fundamentally inconsistent with progressive principles, and thus the inclination of certain leftists to react affirmatively to its actions is utterly absurd. Moreover, there is no justification for shooting civilians in their homes; no rationalization for the murder of children in front of their parents; no reasoning for the persecution and execution of partygoers. Legitimizing or excusing these actions amounts to a betrayal of the fundamental principles of left-wing politics.

We emphasize: there is no contradiction between staunchly opposing the Israeli subjugation and occupation of Palestinians and unequivocally condemning brutal acts of violence against innocent civilians. In fact, every consistent leftist must hold both positions simultaneously.

The seventh of October is a dark day in the history of Israel-Palestine and the lives of the peoples of this region. Those who refuse to condemn Hamas’s actions do immense damage to the prospects of peace becoming a viable, relevant political option. They weaken the left’s ability to present a positive social and political horizon, turning it into an extreme, narrow, and alienating political force. We call on our peers on the left to return to a politics based on humanistic and universal principles, to take a clear stance against human rights abuse of any form, and to assist us in the struggle to break the cycle of violence and destruction.

פרופ’ אביעד קליינברג, Prof. Aviad Kleinberg, President of the Ruppin Academic Center
אבירמה גולן, Avirama Golan, author and journalist
אבתיסאם מראענה, Ibtisam Mara’ana, Former MK, Labor Party
אדם רז, Adam Raz, Historian, Human rights activist
פרופ’ אווה אילוז, Prof. Eva Illouz, Directrice d’études EHESS Paris, Membre of Institute for Israeli Thought
ד”ר אופק בירנהולץ, Dr. Ofek Birnholtz, Bar Ilan University
אורטל בן דיין, Ortal Ben Dayan, Social Activist
אורי בן דב, Ori Ben Dov, Social Activist
אורי וולטמן, Uri Weltmann, National Field Organizer – Standing Together
אורי קול, Ori Kol, Social Entrepreneur
ד”ר אורית סוניה ויסמן, Dr. Orit Sônia Waisman, David Yellin Academic College of Education, Jerusalem
אילון טוהר, Eilon Tohar, Social Activist
איריס לעאל, Iris Leal, Author
אלון- לי גרין, Alon-Lee Green, National Co-Director of Standing Together
ד”ר אלי קוק, Dr. Eli Cook, Head of the General History Department, Haifa University
ד”ר אלמוג כשר, Dr. Almog Kasher, Bar Ilan University
פרופ’ ארנה בן- נפתלי, Prof. Orna Ben-Naftali, the College of Management Law Faculty and the Van Leer Jerusalem Institute
ג’וש דריל, Josh Drill, Social Activist
גדיר האני, Ghadir Hani, peace activist, Standing Together
פרופ’ גילה סטופלר, Prof. Gila Stopler, Faculty of Law, College of Law and Business
פרופ׳ גליה צבר, Prof. Galia Sabar, Tel Aviv University. Former President of Ruppin College
ד”ר דב חנין, Dr. Dov Khenin, Former MK, Hadash, Tel Aviv University
דויד גרוסמן, David Grossman, author
דורית הדר פרסקי, Dorit Hadar Persky, M.A teacher for special education, David Yellin Academic College of Education, Jerusalem
פרופ’ דני גוטוויין, Prof. Danny Gutwein, Haifa University
פרופ׳ דני פילק, Prof. Dani Filc, MD PhD, Standing Together
ד”ר הדר גל, Dr. Hagar Gal, David Yellin Academic College of Education, Jerusalem
ורד ליבנה, Vered Livne, former Director General of The Association for Civil Rights in Israel (ACRI) and leadership member of Standing Together
טלב א-סאנע, Taleb el-Sana, Former MK, Arab Democratic Party, Head of High Committee for Arab Citizens of the Negev
יואב הראבן, Yoav Hareven, leadership member of Standing Together
פרופ’ יואב גולדברג, Prof. Yoav Goldberg, Bar-Ilan University
פרופ’ יונתן רובין, Prof. Jonathan Rubin, Bar Ilan University
יוסי סוכרי, Yossi Sucary, Author
ד”ר יופי תירוש, Dr. Yofi Tirosh, Tel Aviv University
פרופ’ יעל השילוני- דולב, Prof. Yael Hashiloni-Dolev, Ben-Gurion University, Sociology and Anthropology Department
ד”ר יעל שטרנהל Dr. Yael Sternhell, Tel Aviv University
ד״ר יפתח גולדמן, Dr. Yiftah Goldman, David Yellin Academic College of Education, Jerusalem
ד”ר כרמל שלו, Dr. Carmel Shalev, Faculty of Law, Tel Aviv University
ד”ר ליסה קינן, Dr. Lisa Kainan, David Yellin Academic College of Education, Jerusalem
פרופ’ מאיר יעיש Prof. Meir Yaish, Haifa University
מוסי רז, Mossi Raz, former MK, Meretz
ד”ר מיטל פינטו, Dr. Meital Pinto, Zefat Academic College, Ono Academic College
מיטל פלג מזרחי, Meital Peleg Mizrachi, Postdoctoral fellow at Yale University, environmental justice researcher
מיקי גיצין, Mickey Gitzin, New Israel Fund, Executive Director in Israel
ד”ר מירי לביא נאמן, Dr. Miri Lavi Neeman, Arava Institute for Environmental Studies
נדב ביגלמן, Nadav Bigelman, Social Activist, member of Standing Together
פרופ’ נעם זהר, Prof. Noam Zohar, Bar Ilan Univesity
ניב מאירסון, Niv Meyerson, Social and environmental justice activist
סאלי עבד, Sally Abed, Member of national leadership, Standing Together
ד”ר עדי מכמל, Dr. Adi Makmal, Engineering Faculty, Bar-Ilan Uni. Israel
עודה באשארת, Odeh Bisharat, Writer
פרופ’ עירן דורפמן, Prof. Eran Dorfman, Literature Department, Tel Aviv University
פרופ’ עמית שכטר, Prof. Amit Schejter, department of communication studies, Ben-Gurion University, chairman of ACRI
ד”ר ענת הרבסט-דבי, Dr. Anat Herbst-Debby, The Gender Studies program, Bar-Ilan University
ד”ר עפרי אילני, Dr. Ofri Ilany, Van Leer Institute, historian and journalist
ערן ניסן, Eran Nissan, Mehazkim, CEO
צליל רובינשטיין, Tzlil Rubinshtein, Social Activist
רן היילברון, Ran Heilbrunn, Writer
ד”ר רונית דוניץ-קידר, Dr. Ronit Donyets Kedar, College of Law and Business
פרופ’ רות הלפרין-קדרי, Prof. Ruth Halperin-Kaddari, Bar-Ilan University Faculty fo Law
ד”ר רפאל זגורי -אורלי, Dr. Raphael Zagury-Orly, Institut Catholique de Paris
ד”ר שלומית אהרוני ליר, Dr. Shlomit Aharoni Lir, Bar Ilan University
פרופ’ שרון ערמון -לוטם, Prof. Sharon Armon-Lotem, Bar-Ilan University
תום יגיל, Tom Yagil, Social and Environmental Justice Activist
ד”ר תמר אשר שי, Dr. Tamar Ascher Shai, David Yellin Academic College of Education, Jerusalem