Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-Tu abandonné, loin de mon salut et des paroles de mon rugissement ? Mon Dieu, j’appelle au jour et Tu ne réponds pas, à la nuit : nul repos pour moi.1
”Il n’est pas innocent que ces paroles du Psalmiste soient aussi les dernières prononcées par Jésus sur la croix : ce qui nous relie à nos frères chrétiens n’est pas une certitude mais un doute. “Depuis la sixième heure il y eut des ténèbres sur la terre jusqu’à la neuvième heure. Vers la neuvième heure Jésus clama à grande voix : […] Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?2” Ce n’est pas seulement le pieux qui doute ici : c’est Dieu. L’incarnation l’exigeait : le doute, c’est l’homme et si Dieu s’incarne, il lui faut douter.
Dans la nuit de Gethsémani, Jésus doute déjà, il a peur, il pleure, son âme est “triste à mourir”. Moi, je lis cette scène comme un Juif incrédule, elle me touche à la manière d’un beau conte ou comme le témoignage des souffrances de l’un des miens, un parmi d’autres. Seulement, je ne peux m’empêcher de songer aussi à ce qu’elle doit évoquer aux entrailles du croyant qui la lit, du Chrétien pour lequel ces larmes de désespoir sont celles de Dieu même, de Dieu fait homme.
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