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Se garder du contact

Parmi les règles qui entourent les relations entre hommes et femmes et la possibilité de leur sexualité, on trouve la shmirat neguia, une appellation fourre-tout qui propose, en résumé, d’éviter tout contact physique avec les autres. Noémie Benchimol, femme juive moderne et orthodoxe, explore cette idée sans concession ni attendus.

Expérience de pensée : Au cours d’une interaction sociale quelconque, vous tendez la main à une personne du sexe opposé, le plus naturellement du monde. Mais stupeur, au lieu qu’un bref contact protocolaire vienne accepter ce salut, votre main pend, idiote, sans que personne ne vienne la serrer, sans qu’aucune main ne vienne la saisir. Un peu honteux, vous reprenez votre main soudainement alourdie. Ce refus a pour conséquence paradoxale de sexualiser a posteriori votre main tendue des plus usuelles, des plus sociales. Il y avait là un jeu codifié et l’autre vous a signifié qu’il n’y jouait pas, qu’il était en dehors, que votre contact était interdit, impur, qu’il devait s’en préserver. En un mot comme en mille : vexant.

Ce refus du contact, qu’il provienne de juifs orthodoxes ou de musulmans pratiquants, n’est pas en odeur de sainteté dans nos sociétés. Soit qu’on y réponde par un culturalisme relativiste des plus paternalistes (c’est leur culture, il faut respecter), soit qu’on soit choqué par cette irruption de la séparation dans l’espace public et qu’on y réponde par un rejet pur et simple. Je parlerai pour ma part plus précisément du concept juif de shmirat neguia, même si certains de ses traits peuvent éclairer le cas musulman.

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