
8 avril
Une évidence
Au départ il y eut le Séder de Pessah. En bonne et due forme, nous nous préparions à célébrer tout en symbole le retour à la liberté. L’affaire avait été tranchée de prier sur Zoom en famille, cela tiendrait le temps que ça tiendrait. Des mauvaises connexions, de l’impatience et du manque d’ingrédients, nous ferions notre affaire. Dans le fragile équilibre de ce soir, si différent des autres soirs – et pouvait-il en être autrement? Où serions-nous l’année prochaine, le mois prochain, le jour d’après?
Dans le fragile équilibre de cette soirée… une image surgit, silencieuse. Je ne la lâchai pas. J’ai photographié mon écran.
Cela ressemblait à une image d’archive en construction. De celles que les tout jeunes enfants montreraient à leurs petits-enfants au cours des décennies à venir. Chemises blanches, kippa noire, boucles longues et plateaux, qui, de génération en génération, passaient sur les têtes mal cadrées pour imposer à Zoom notre tradition.
Quelle trace resterait-il de nos vies assignées à résidence, de nos voix fatiguées, du lien réinventé? Il nous faudrait des témoignages d’enfants et d’adolescents. Il nous faudrait des témoignages d’enfants et d’adolescents que l’on pensait dangereux du seul fait de leur âge.