Contenu réservé aux abonnés

Interdit de synagogue

© Assaf Rahat, Untitled from the series Night of the Minotaur, 2018, tempera on Paper, 150×105 cm
Courtesy of Chelouche Gallery for contemporary art, Tel Aviv

À BIEN DES ÉGARDS, MA BAR MITSVA REPRÉSENTA L’ÉVÉNEMENT LE PLUS TRAUMATIQUE DE MON EXISTENCE.

Rien que d’y penser, j’ai les papillotes qui en frémissent d’effroi. Si après cette tragique mésaventure, je n’ai pas renoncé au judaïsme, ce fut plus pour conforter ma mère dans l’idée que j’étais le digne descendant de Moïse que par adhésion à une religion assez sadique pour obliger un tout jeune homme haut comme trois pommes à gravir l’autel de la synagogue afin d’ânonner un bout de parasha auquel il ne comprenait rien et ce devant un parterre faussement ébahi.

Ce jour-là, je ne devins pas un homme – ridicule et sinistre plaisanterie ! –, non ce jour-là, je connus seulement le goût amer de la défaite, de l’humiliation en public, de l’intime tragédie d’un enfant innocent plongé dans l’enfer d’une synagogue chauffée à blanc. Je connus aussi ma première attaque de panique, ma première crise d’angoisse, ma première envie de défenestration quand, dans la voiture qui me menait à l’échafaud, je songeais que sitôt arrivé, je devrais non seulement affronter le regard d’une foule plus ou moins hostile mais aussi celui de l’Éternel dont je connaissais déjà le caractère ombrageux et volatil.

Abonnez-vous pour lire cet article

S’abonner en ligne