Contenu réservé aux abonnés

Le récit du bouc émissaire

Une petite digue, Régine Waintrater

Le bouc émissaire est un phénomène universel, selon le concept remis très à la mode par René Girard dont la théorie corrobore les recherches psychologiques antérieures. Pour faire groupe, quelle que soit la taille du groupe, on a besoin de distinguer entre l’intérieur et l’extérieur, entre « nous » et « eux ». Il s’agit d’une étape indispensable de constitution d’une groupalité, qu’elle soit familiale ou nationale. C’est un mécanisme normal qui, fort heureusement, ne conduit pas toujours à des exterminations.

Mais quand le groupe se sent menacé, ce processus peut devenir catastrophique et se solder par l’extermination de ce bouc émissaire, désigné comme responsable du mal. Il y a l’idée sous-jacente que concentrer tout le mal sur un groupe ou un individu permet de conserver, à terme, l’unité des autres membres du groupe. C’est un phénomène que les juifs connaissent bien, qui ont été souvent désignés comme boucs émissaires, qu’il s’agisse de la peste, des calamités, du capitalisme, du communisme…

Ce mécanisme est toujours discriminant, mais pas nécessairement discriminatoire. On voit ça partout, à des niveaux quotidiens et « normaux », dans les cours d’écoles, les fêtes de famille, les relations de voisinage. Le différent et le semblable, le lointain et le proche, le « eux » et le « nous » sont des constantes du psychisme.

Abonnez-vous pour lire cet article

S’abonner en ligne