Nova, Crocus, le Bataclan, nous continuerons de danser

DR maxima – “Krokus/крокус”

À vous idiots fanatisés, à vous abjects terroristes islamistes, à vous absurdes salopards,

Juste avant shabbat est tombée la nouvelle d’un autre exploit de votre fait. On en sait encore très peu, et je ne m’aventurerais pas ici à dérouler quelque analyse que ce soit sur ce qui s’est passé à Krasnogorsk vendredi soir. On sait juste que c’est vous, encore une fois, et que les morts se comptent par dizaines, les traumatisés par milliers. 

Dans la banlieue de Moscou, vendredi soir, devait se tenir un concert, relax, un moment festif dans un monde odieux, un truc qui fait du bien et permet d’oublier, de prendre de la distance, peut-être pour mieux penser le lendemain. Mais apparemment vous n’étiez pas d’accord. Vous avez un truc avec la fête, non ? Surtout quand elle porte un message ouvert et détendu. Ça vous chiffonne et, dans votre logique de moins-que-rien, être chiffonné aboutit à assassiner. 

Alors puisque vous vous comportez comme des gosses débiles et capricieux (malheureusement à même de faire le mal qu’ils souhaitent), abordons les choses à votre niveau. Dans votre immense lutte sacrée, vous voulez, ce sont vos mots, viser “des mécréants”, de ceux qui mèneraient la guerre contre l’islam et les Musulmans. Quelle ironie, tout de même de la part de vous, demi-barbus convertis d’hier, qui tuez plus qu’à votre tour des Musulmans et assassinez les sages de l’islam. 

Je ne vais même pas prendre la peine de souligner que la majorité de vos victimes sont des Musulmans – et je ne parle que des morts, si on inclut tous tous ceux qui vous subissent, on se situe probablement encore plus près de la totalité. Ni du fait que les érudits de l’islam rejettent sans équivoque votre interprétation meurtrière. Je vais juste revenir sur quelques unes de ces cibles que vous affectionnez tant même si, rassurez-vous, ça marche, nous sommes dévastés par vos assassinats, nous qui chérissons la vie. 

En novembre 2015, meute d’idiots éhontés, vous choisissiez le Stade de France, les terrasses de Paris et un concert au Bataclan pour semer la haine, le chaos et la mort. Au stade, un match amical France-Allemagne, auquel assistaient des milliers de gens du peuple, y compris assurément nombre de gens qui se diraient volontiers musulmans. Mais l’idée d’une foule métisse vibrant dans le 93 pour un jeu amical entre deux puissances qui se sont tant entretuées, l’idée de jeunes gens qui profitent d’une douce soirée d’automne ou d’un concert de tendres rockers pleins d’autodérision, ce que cela porte de symbole, c’était insupportable, c’est ça ?

© Noemi Safir, Nova 7 Oct 2023 – noemisafir.com

En octobre 2023, tas d’ignares frustrés, vous frappiez le festival Nova dans le désert israélien, un festival de musique “pour la paix”, à quelques kilomètres de Gaza, qui s’était installé là précisément pour marquer la conviction que “les autres en face” ne sont pas des ennemis. Vous avez choisi ce moment pour assassiner, violer, mutiler, sans jamais garder votre lame. Mais l’idée que des kufar, pire, des Juifs – qui, de fait, ne célébraient pas un Simhat Torah kasher –, puissent vouloir vivre ensemble et en bonne intelligence avec les Palestiniens de Gaza, ce festival pour la paix, dans lequel on voyait non seulement une jeunesse israélienne festive et pacifiste mais aussi des touristes, des Musulmans, des Chrétiens, des queers, des handicapés, l’idée d’une foule volontaire célébrant l’espoir de la paix, ce que cela porte de symbole, c’était insupportable, c’est ça ?

© Zoya Cherkassky, The Terrorist Attack at Nova Music Festival, 2023, mixed media on paper, 24.5×39.5 cm – rg.co.il

En mars 2024, bande d’imbéciles ridicules, vous visez une salle de concert dans la banlieue de Moscou, juste avant le concert de Пикник (Pique-nique), un groupe populaire à mi-chemin entre les Innocents, Renaud et une chorale soviétique tranquillement rock. C’est le début du Carême orthodoxe et ceux qui sont là, s’ils sont mécréants, le sont d’abord vis-à-vis de leur tradition, pas de la vôtre. Mais ça aussi, l’idée que, même dans l’ambiance glauque et mortifère de la Russie belliqueuse tout juste remariée de force à Poutine, on puisse vouloir respirer un soir dans une belle salle de concert, souffler un peu, s’amuser, chanter, danser, ce que cela porte de symbole, c’était insupportable, c’est ça ?

Le groupe de rock russe Piknik

Manifestement, vous avez un souci avec l’idée qu’on s’amuse au stade, qu’on se détende en terrasse ou en famille pour un feu d’artifice, qu’on aime le rock bon-enfant à Paris, la techno en Israël ou la musique populaire à Moscou. À chaque fois, il faut que vous veniez gâcher la fête avec votre dépression toxique, que vous veniez assassiner et meurtrir des familles et des générations. Et vous y arrivez plutôt bien, vous nous faites mal et vous nous faites chier. Mais je dois vous dire un secret : vous pouvez bien mourir de nous tuer, nous continuerons à danser, à chanter, même en ayant mal, à nous détendre et à prendre de la distance pour penser encore et, finalement, vous mettre en échec. 

La conclusion, en hommage à toutes les victimes de Krasnogorsk, de cette salle ironiquement appelée Crocus (vous savez? la fleur qui renaît de l’hiver et donne l’épice la subtile au monde), je la laisse à Otava Yo, un groupe russe bigrement plus intelligent et plus punk que vous, et à leur chanson “Soumetskaïa” (qui signifie à peu près “la fille de Pétaouchnok”), élégamment sous-titrée “Futilités russes pour une bagarre” :

Меня били-колотили, всё по глазу наровили
Угадали по плечу – я стою и хохочу
Ой, не всё же с горя плакать, ой, не всё же мне тужить
Дайте маленькое времечко весёлому побыть

Ils m’ont battu, ils m’ont tapé, et j’ai un sacré coquard
Ils ont frappé mon épaule – je suis debout et je ris
Oh, je ne peux pas pleurer toujours, je ne peux pas me lamenter encore
Laissez-moi le temps de me réjouir, et de me libérer du chagrin.

Oh malheureux mollusques de la terreur islamiste, je ne vous veux rien de bon, mais si je devais quand même vous souhaiter une chose, c’est qu’il vous soit donné, un jour, d’aller voir un match de foot ou un feu d’artifice, de boire une bière fraîche ou une menthe à l’eau en terrasse, de danser au petit matin dans le désert ou d’aller au concert pour célébrer le printemps – et que, ce jour-là, aucun peine-à-jouir si satisfait de lui et sans éducation ne vienne vous gâcher la fête en vous ôtant le souffle. 
Et sinon, puisque vous y croyez, que l’enfer vous accueille de ses flammes.