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Scories et autres images

Comment lutter contre la sensation d’inexistence de l’autre, d’absence, lorsqu’on ne peut plus lui faire face ? L’image, dans le cadre analytique, pourrait être une façon de faire avec le manque.

© Andi Arnovitz, “Epidemiology”, 2019, watercolors, lightbox – photo: Elad Sarig – https://andiarnovitz.com/

Un long après-midi de confinement, je montre à mon fils de trois ans une reproduction de la peinture de Chagall « Moïse recevant les tables de la Loi ». Je lui explique que selon la Bible, Dieu a donné la loi à Moïse pour qu’il sache ce qui est interdit entre les hommes. Il me demande à mon étonnement pourquoi Dieu lui a donné la loi alors que Moïse la savait déjà.

Le savoir est déjà-là, et les lois écrites, sociales, actualisent, interprètent ce savoir originel, hétérogène et indicible. Elles l’orientent aussi, puisque le désir de chacun se fonde sur la loi telle qu’elle lui a été transmise. Freud s’est intéressé aux symptômes hystériques, aux actes manqués, aux rêves, aux lapsus, à toutes ces scories de la vie normale où il est allé chercher les indices d’une effraction d’un savoir inconscient. Il a fondé l’analyse comme méthode d’élaboration d’un savoir conscient à partir de ce savoir originel fragmentaire. Cette élaboration suppose une perte, celle d’une présence originaire totale, d’un savoir total où serait abolie la différence entre soi et le monde. 

Dans le temps étiré, confiné, dans lequel nous sommes tous plongés, la réalité peut se mettre à vaciller, favorisant des émergences inconscientes, sources de désir mais aussi d’angoisse, dans la proximité avec cette présence originaire.

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