Un projet pour militer au coeur des communautés juives

ENTRETIEN AVEC SOIZICK JAFFRÉ

En quoi consiste le groupe Hakeshet Habatim ?

Pour le moment, c’est une page internet, une boîte mail, et c’est un groupe sur Facebook, dont l’objectif est de développer un réseau de membres des synagogues. Nous voulons que les personnes LGBT puissent se retrouver au sein des communautés auxquelles elles appartiennent, pour partager les grands moments de la vie juive. Il y a d’une part ce besoin venant de personnes LGBT dans les synagogues que l’on pourrait qualifier d’inclusives, et qui sont les synagogues issues du judaïsme progressiste, et de l’autre part la nécessité pour les communautés elles-mêmes, les rabbins, les conseils d’administration de ces synagogues, d’avoir un interlocuteur et un groupe référent de plain-pied dans la vie de la communauté. Nos communautés sont elles-mêmes en demande, car cette différence concerne des individus, et toute leur famille. Quant aux personnes LGBT, elles souhaitent rester chez elles, dans leur communauté, et trouver des personnes avec lesquelles elles partagent ce point en commun.

En quoi votre groupe diffère-t-il des associations LGBT et juives ?

Vous connaissez le Beit Haverim en France, membre de l’Inter-LGBT, qui existe depuis une trentaine d’années. La différence réside dans le fait que nous évoluons en interne dans certaines synagogues, que nous venons de nous créer et que nous sommes le signe d’une évolution au sein des communautés. Sur le plan international, il existe de très nombreux groupes de toutes sortes, membres du World Congress of LGBT Jews. J’ai côtoyé le Beit Haverim depuis 1999, j’allais aux soirées. Des années plus tard, en 2012, j’en suis donc devenue présidente, ainsi que représentante au Congrès Mondial Juif LGBT (World Congress of LGBT Jews), pendant une période chargée émotionnellement avec les « débats » sur le mariage pour tous plutôt pénibles car ils ont réveillé l’extrême-droite. Je pense qu’il faut de tout. Notre but est d’agir et d’organiser la visibilité. Nous devons tous lutter contre les phénomènes d’isolement, de rejet, d’invisibilité forcée et aussi contre l’éloignement des synagogues, perçues comme hostiles. Nous voulons contribuer à créer cette légitimité dans les synagogues libérales et massorti, en étant plus nombreux, plus forts, et plus vivants – même si nous ne serons toujours qu’une minorité dans la minorité. Les paroles positives ne suffisent pas, il faut vivre les choses concrètement et permettre aux gens de se sentir à la maison.