Contenu réservé aux abonnés

Édito : Le frère, l’autre…

L’édito du rabbin Delphine Horvilleur.

Au commencement, la fraternité est impossible. C’est en tout cas ainsi que Bereshit – la Genèse débute, dans le récit de la violence faite au frère. A peine parait la fratrie que naît le fratricide : Cain tue Abel. Et l’ombre du meurtre originel hante le reste du livre : Jacob et Esau combattent in utero et rivalisent dès l’enfance, Joseph est jeté dans un trou puis vendu par ses frères. 
Au commencement, mon frère n’est que mon ennemi, mon assassin ou ma victime. Et l’histoire biblique des origines répète en boucle ce scénario conflictuel de jalousie et de haine. Parmi tous les frères-ennemis qui hantent le texte, un duo semble avoir quitté les pages de la Genèse pour habiter celles de l’actualité. C’est en tout cas ainsi que le conflit judéo-arabe est souvent raconté, comme s’il rejouait une scène ancestrale, comme s’il avait migré des textes sacrés vers nos écrans de télé. Ainsi, la relation judéo-musulmane est bien souvent racontée par le prisme des deux fils d’Abraham, Isaac et Ismaël, incapables de se réconcilier.
Les traditions juives et musulmanes font bien de ces deux-là leurs ancêtres, comme des figures-archétype de leurs identités respectives. Dans la Thora, les deux fils d’Abraham, séparés dès l’enfance au nom d’un héritage sans partage, racontent une famille qu’on qualifierait sans doute aujourd’hui de « dysfonctionnelle ».

Abonnez-vous pour lire cet article

S’abonner en ligne