
Quand le rédacteur en chef m’a donné le thème du numéro, j’avoue être restée un peu coite. Qu’ai-je à dire, moi, sur l’intelligence artificielle, moi qui ne suis pas utilisatrice de ce type de logiciels, moi qui ne comprends pas vraiment comment fonctionne le net, les algorithmes, les modèles de langage naturel. Et puis, surtout, quel rapport allais-je pouvoir trouver avec le judaïsme ? Finirais-je par ressembler au Juif de la blague, qui est peut-être une Juive d’ailleurs, qui après des années sur une île déserte en compagnie d’éléphants publie un livre sur « Les éléphants et la question juive » ?
Et puis, j’ai réfléchi : si, par artificiel, on n’entend pas seulement fait de main d’homme mais aussi quelque chose de non naturel, ou de surnaturel alors il existe bien dans l’histoire du judaïsme et, plus précisément dans la tradition kabbalistique, un phénomène qui fait intervenir des intelligences ou personnalités angéliques qui inspirent, instruisent ou dictent, j’ai nommé le phénomène du maggidisme.
Loin d’avoir été un phénomène démocratique et ouvert à tous comme les logiciels conversationnels modernes, le maggidisme est un phénomène prémoderne dans lequel un Sage, un mystique, un érudit, se dit visité par un messager ou un envoyé céleste pour l’instruire des secrets de la Torah, l’aider dans la formation de son caractère et le travail de sa personnalité ou lui dicter des livres.