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Marchands de bestiaux

Plus que dans le cadre urbain qui a marqué les débuts de l’histoire des juifs en Alsace mais n’a pu s’affirmer qu’à partir du dernier quart du XIXe siècle, c’est dans la campagne que s’est forgé progressivement un judaïsme spécifique, une modalité particulière du rapport à soi-même et aux autres.

La culture du judaïsme rural alsacien se caractérise par la plénitude d’une vie juive qui informe les représentations, les sentiments et les comportements d’un chacun, et qui épouse le rythme d’une religiosité du quotidien comme des fêtes, en refusant tout fanatisme vétilleux. En même temps que le juif d’Alsace apprivoise une terre qu’il a faite sienne, dans laquelle il a inscrit ses traces, il enrichit ses liens avec le monde environnant qui s’éloigne de la haine et du mépris, et qui entretient avec lui une relation de proximité, voire de familiarité.

Le rôle économique des juifs dans la campagne alsacienne a peu évolué tout au long du xIxe siècle. Placés entre les paysans et le monde de l’administration, des notaires, des notables, ils remplissent la fonction d’intermédiaire… Ils assurent les transactions commerciales liées à l’achat et à la vente des chevaux et du bétail, à celle du prêt d’argent, au commerce des immeubles, parcelles et propriétés ; leur expérience et leur connaissance du commerce des bestiaux leur confère un quasi-monopole, prolongé par celui de la boucherie. Ce monopole du commerce des bestiaux et de la viande de boucherie est mis en évidence par le préfet du Bas-Rhin en 1843 : « À Strasbourg, lorsque le marché hebdomadaire tombe sur un jour férié pour les juifs, il faut le changer à peine de voir la ville dépourvue de viande pendant huit jours ».

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