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Hommage à Christian Boltanski

Photo de classe à l’école Ave Maria, 22 rue de l’Ave-Maria, Paris 4e arrondissement, France, juillet 1942.
© Mémorial de la Shoah/coll. Sabine Gartner Bromberg

ARRÊTE TOUT, ÇA NE SERT À RIEN !

Chaque matin, il fallait l’emmener de force. En chemin, il s’agrippait aux réverbères. Il hurlait comme si on le conduisait à l’abattoir. Son frère aîné, Jean-Élie qui, à ma connaissance, n’a jamais donné d’ordre à personne, devait le traîner jusqu’à la porte de l’établissement. Christian l’a raconté des milliers de fois : enfant, l’école le terrorisait. Les élèves le traitaient de « petit rabbin ». Ses maîtres le croyaient atteint d’une forme de crétinisme. À l’âge de dix ans, après une primaire chaotique et intermittente, il décida qu’il n’irait plus en classe.

Sa mère le déscolarisa sans se faire prier. Je la soupçonne même de l’avoir vivement encouragé. Elle ne supportait pas d’être séparée de ses enfants. Elle refusait de les confier à qui que ce soit. A fortiori aux personnes chargées de les instruire qu’elle qualifiait de « tortionnaires diplômés ». Pour déroger à la loi, elle dut invoquer quelques ennuis de santé et brandir un certificat de complaisance établi par son mari médecin. Celui-ci s’exécuta, non sans renâcler.

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