
La Bible critique du populisme
Ce qui est bien avec la Bible hébraïque, et qui fait en un sens son éternelle actualité, qu’on soit ou non religieux, c’est sa façon de nous ouvrir à la lecture, à la réflexion et au commentaire de laf matière humaine pure, sans didactisme lourd ni édification moralisatrice. J’ai déjà eu l’occasion dans ces pages de caractériser la méthode philosophique de la Bible comme une pensée en récit, comme on dit d’un manteau qu’il est en fourrure, pensée dont l’outil principal est l’intertextualité (les renvois, les parallélismes, les allusions, les réécritures), la Bible étant un livre-monde, ou plutôt une collection de livres faisant monde.
C’est ainsi que la Bible nous évite un roboratif traité sur le politique à la manière de La République de Platon pour nous donner à la place un récit historiographique vivace et vivant qui court depuis le livre de Josué jusqu’aux livres des Rois et qui tisse dans les narrations des instantanés saisissants sur le pouvoir, désiré, fantasmé, gardé, jalousé. Où l’on trouve, non pas un modèle de ce que devrait être le gouvernement idéal, mais une description ancrée et particularisée de ce à quoi ressemble le pouvoir réellement exercé, avec les idées de derrière, les passions.